Ed van der Elsken au Jeu de Paume : la jouissance hors marché

Beethovenstraat Amsterdam, 1967 Ed van der ElskenLe photographe Ed van der Elsken (1925-1990), qui fait l’objet de sa première rétrospective en France au Jeu de Paume, a capturé dans le Paris des années post-Libération l’aspect le plus précieux de la vie contemporaine, la possibilité de jouir de la vie en dehors des règles du marché, de s’habiller librement, d’embrasser librement entre adultes, de s’enivrer d’amitié, d’alcool et de sexe tant que cela nous chante.

D’Une histoire d’amour à Saint-Germain-des-prés dans les années 50, roman à clé sur l’histoire d’amour libre entre une artiste australienne muse du photographe, Vali Myers, et un jeune homme mexicain, Roberto Inignez-Morelosy, à Eye love you qui entremêle les visions les plus modernes et radicales de l’amour et des portraits de l’amour et de la survie dans les pays pauvres, jusqu’à Bye sur la déchéance physique du photographe, Ed van der Elsken a capturé la vie comme une prise de bouche contre les conventions de l’époque.Brigitte Bardot Paris, 1952 (v. 1979) Ed van der ElskenTout ce qui a trait au désir s’accorde à son objectif, de Brigitte Bardot avant la gloire à l’expression des minorités sexuelles des transsexuels indiens et japonais. La photographe américaine reconnaîtra un précurseur de sa Ballad of sexual dependancy chez cet artiste amateur de montage de diapositives exprimant toutes les faces du désir. La muse Vali Myers n’est pas tendre envers l’époque traversée par leur troupe de “vagabonds” (en anglais dans le texte), tel qu’elle écrit à Ed van der Elsken en 1979 : “Nous vivions dans les rues et les cafés de notre quartier comme une meute de chiens bâtards et selon la stricte hiérarchie d’une telle tribu. Les étudiants et travailleurs étaient des “étrangers”. Les quelques touristes à l’affut de l’existentialisme étaient des “pigeons” pour un repas ou un verre, mais personne ne se vendait. Il y avait toujours de l’alcool bon marché et du haschisch algérien pour s’en sortir”.
Pierre Feuillette (Jean-Michel) et Paulette Vielhomme (Claudine) s’embrassant au café Chez Moineau, Rue du Four Paris, 1953 Ed van der Elsken

Il faut bien imaginer contemplant les photographies de van der Elsken ce qui a sauvé la jeunesse d’Europe au sortir de deux guerres qui ont repoussé les limites de la barbarie en à peine plus de trente ans d’intervalle. Eye love you, c’est Dionysos au secours de la jeunesse occidentale, en quête de jazz, d’alcool et d’une vie sexuelle intense pour se purger du goût du sang.

Ed van der Elsken, au Jeu de Paume jusqu’au 24 septembre 2017

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *