Maps to the stars de David Cronenberg : la cartographie du non-être

Enfant star abominable demandant à une petite fille atteinte d’un lymphome non hodgkinien comment elle a attrapé le sida à son âge, ex-star (Julianne Moore, l’icône du grand cinéma américain de Big Lebowski et Short cuts à Loin du paradis) ravie des malheurs de sa rivale qui lui offrent le rôle tenu par sa propre mère dans le scénario original dont elle va faire le remake, thérapeute manipulateur (John Cusack) assoiffé par l’argent et la respectabilité, jeune schizophrène (Mia Wasikowska, l’une des meilleures comédiennes américaines de la jeune génération après notamment Des hommes sans loi) béate à l’idée d’être l’esclave d’une ex-star déchue de Hollywood, producteur imbécile ravi d’avoir réuni 58 millions de dollars pour Bad Babysitter II ou pour une nouvelle fresque idiote de super-héros…

Maps to the stars est comme l’indique son titre la carte du mal moderne, le portrait d’une série de monstres contemporains réfugiés auprès des dieux argent, célébrité, magazine de décoration… Il serait erroné d’y voir un simple portrait de Hollywood comme prévient le cinéaste puisque les comportements qu’il décrit, notés par le scénariste Bruce Wagner au cours de sa carrière, sont emblématiques de maux beaucoup plus profonds, la “production de la honte” dont parlait Lacan à propos du monde moderne, qui reproche au sujet de ne pas être assez performant, célèbre, en bonne santé, dynamique, joyeux, jeune…

David Cronenberg, en grand cinéaste athée, filme un monde qui oublie qu’il n’existe pas d’autres étoiles que des boules de plasma très éloignées de la terre, et que la liberté célébrée par Eluard dans le poème homonyme récité en boucle dans le film est la seule source de dignité de l’homme dans un monde emporté par des ellipses autour du soleil dans l’espace fini.

“Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.”

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